Il y a un texte dont je suis fier dans tout ce que j'ai écrit. Enfin, vraiment fier.
C'est toujours délicat pour quelqu'un qui écrit de se satisfaire de ses œuvres. Celle-là fait exception.
Je suis en IUT à Lyon pour les /mylife. La bibliothèque universitaire a organisé un concours d'écriture avec les catégories nouvelle, poésie, bande-dessinée et théâtre/récit dialogué. J'ai la grande fierté que j'ai été double lauréat de ce concours. J'avais participé à toutes les catégories sauf bande dessiné, j'ai remporté la nouvelle et le récit dialogué. Voilà pour le contexte.
Je ne croyais pas gagné la nouvelle. Vraiment. J'étais très fier de mon texte, mais je le trouvais trop bizarre, écris à la première personne et au présent, avec plein de bizarreries dans le genre. Mais, et excusez-moi si vous pensez que mes chevilles gonflent, le jury a choisi mon texte à l'unanimité. Et pour moi c'était la catégorie la plus importante car la plus difficile pour se distinguer.
Pourquoi je vous raconte ça? Ce forum m'a beaucoup aidé et fait plaisir niveau écriture. J'ai déjà beaucoup partagé avec vous. J'avais vraiment envie de vous montrer ce que j'avais fait pour autre chose qu'AF après m'être déchaîné ailleurs. Mais hélas j'avais peur de deux choses: le risque qu'on me retrace IRL, chose que je préfère toujours éviter, et le risque de paraître prétentieux.
Finalement je cède à la tentation et je vous livre mon texte. Pour vous. Comprenez bien que vous autres personnes de ce forum et les concours d'écriture du forum sont réellement mes raisons majeures et principales de rester. C'est donc en ayant confiance en vous et en espérant que vous comprendrez pourquoi je fais ça que je vous livre mon texte: Ego.
Bonne lecture.
(note: je met un copyright sur le personnage du Joueur, je compte beaucoup le réutiliser).Ego
La vie n’a aucun intérêt.
Rien ne m’intéresse en ce monde. Rien ne vaut vraiment la peine d’être vécu. Chaque journée se ressemble, les heures se suivent, chacune plus longue que la précédente. Ce que j’ai à faire m’est dicté, je n’ai qu’à suivre le cours des choses. Pas de volonté à mettre. Rien de vraiment plaisant. Un monde qui sonne creux.
Je suis un étudiant on ne peut plus normal. Je vis seul dans un appartement que mes parents me payent puisque j’habite à une heure et demie de mon lieu d’étude. J’aurai pu faire le trajet chaque jour, mais j’ai négocié pour partir, avoir la paix. Loin de mes parents, qui m’imposent leurs règles de vie commune. Qui me demandent où je sors le soir quand je sors. Qui m’interrogent quand je veux juste me poser dans ma chambre. J’ai donc réussi à obtenir de quitter le nid familial pour voler de mes propres ailes. En gros, j’ai obtenu qu’on me laisse tranquille.
J’ai choisi des études pas trop dures ni trop longues mais avec suffisamment de débouchés vers des secteurs dans lesquels je suis plus doué qu’ailleurs. Je travaille assez pour avoir mon diplôme sans être dans les derniers, sans plus. Je me ferai embaucher dans une boîte sûre, tranquillement. Ma mentalité pour mon futur travail est simple : je fais mon boulot, payez-moi, laissez-moi tranquille.
Encore une contrainte pénible pour un monde qui l’est encore plus. On ne peut y vivre sans argent. Donc il faut de l’argent, et pour cela il faut travailler. Sacrifier des heures entières de ses journées, de sa vie, pour être autoriser à la vivre. Permettre à des gens de gagner plus d’argent. Pour vivre avec plus de choses. Vivre moins pour vivre mieux. Encore une stupidité. Je ne veux pas beaucoup d’argent. Donnez m’en de quoi vivre dans mon coin et le minimum pour essayer de profiter de cette vie et laissez-moi tranquille.
La journée s’écoule comme les précédentes.
D’abord, j’arrive en cours deux minutes avant la sonnerie, pour ne pas trop avoir à parler aux gens. Je vais simplement les saluer, échanger un ou deux mots sur les sujets du moment, puis travailler. Faire pendant quatre heures ce qu’on me dit, écrire, apprendre, comprendre. Je ne poserai pas de questions. Ceux qui posent des questions se font remarquer. Je ne veux pas me faire remarquer. Il vaut toujours mieux être n’importe qui. Je suis un caméléon qui se fond dans le décor, imitant les autres pour ne pas être distingué.
La pause de midi. Je retrouve un groupe de personne que je côtoie fréquemment et avec qui je m’entends bien. J’entends par là que leur compagnie n’est pas trop ennuyante. Je mange avec eux, discute tranquillement. De tout et de rien. La discussion ne m’intéresse pas beaucoup mais j’y participe normalement, ajoutant ma pierre à l’édifice entre deux bouchées. Les gens silencieux sont mal vus, ou au moins remarqués. Mieux vaut parler pour ne rien dire que de se taire.
Les cours de l’après-midi passent comme ceux du matin, et je rentre chez moi. Quelques révisions pour ne pas baisser, quelques parties de jeu vidéo où je suis censé m’amuser à tirer sur d’autres joueurs pour montrer que je suis plus fort qu’eux. Seul élément amusant : les entendre s’énerver. Rire du monde et rire des autres est l’une des rares choses qui m’amusent. Dommage que les gens soient si vides et le monde si fade.
Je vais en soirée, comme il y en a de temps en temps. Pour être vu un minimum, pour ne pas passer pour un asocial qui ne sort pas. Pour voir les gens s’agiter sur de la musique que beaucoup n’aiment pas, juste bouger, même plus danser, voir les gens ivres draguer avec la délicatesse d’un pachyderme, voir le monde s’enivrer, perdre de l’argent dans des boissons que beaucoup n’aiment pas vraiment, juste pour perturber ses sens, se désinhiber. Etre sobre au milieu de ses camarades ivres, c’est un instant sans pareil, où je saisis l’ironie du monde et j’ai envie de rire à gorge déployée, pour me moquer des autres, du ridicule de ce que vois. Puis je bois à mon tour, pour arrêter de trop penser, pour me trouver dans un état où les autres me paraîtront plus intéressants.
Je regarde le monde autour de moi avant de quitter la boîte : dans un coin des gens qui vomissent, un étudiant de ma classe assis, l’air hagard, un autre courant en brandissant une boîte de préservatif, une fille perdue, qui n’a personne pour la ramener et n’ose pas demander à tous ces inconnus ivres, une dernière en larme dans un coin… Je garde ces scènes en rentrant chez moi, c’est ça, les soirées censées être si géniales ? Ce qui est censé devenir les meilleurs souvenirs de ma vie étudiante ? Je m’interroge sur ce que je suis censé ressentir, avant de m’effondrer dans mon lit.
* * *
Je me réveille le lendemain avec mon réveil, les yeux lourds et la bouche pâteuse. Je me traîne comme je peux, mange ce qui passe à ma portée, balance en vrac des affaires dans mon sac et repars pour une nouvelle journée de cours. C’est difficile. Je me cale dans un coin du bus et me prends la tête entre les mains. Suis-je supposé en tirer un tel plaisir de ce genre de soirée qu’il compensera cette fatigue qui m’alourdit tellement ? Je manque de rater mon arrêt tellement je suis endormi.
J’arrive à l’école et me prépare à affronter quatre longues heures de plus. C’est à peine si j’écoute ce que déblatère mon professeur. Je note paresseusement ce que je peux. Je vérifie simplement à la pause mon emploi du temps : je n’ai pas cours cet après-midi. Joie. Bonheur. Sieste en approche. Je souris à cette pensée : moi qui n’est pas goût à grand-chose je soupire d’aise à l’idée de pouvoir dormir plus longtemps, simplement parce que je suis fatigué. Quelle ironie.
A la pause de midi, je m’apprête à rentrer chez moi lorsque je me fais intercepter par le délégué de la classe :
-Salut !
-Salut…
-C’était super hier, non ?
-Jusqu’à ce matin…
-Ah bah comme d’habitude ! Dis, désolé de te déranger pour ça, mais t’as remarqué qu’on avait une absente aujourd’hui ?
-Lors des rares moments où j’étais éveillé, oui.
-C’est vrai que t’as l’air de dormir encore un peu. Enfin bref, c’est toi qui habite le plus près d’elle, si tu pouvais lui filer ces cours, ça serait vraiment sympa de ta part. Tu comprends, elle est dans mon groupe de travaux pratiques, je ne voudrai pas qu’elle se mette en retard.
Je le regarde en pensant très fort « si j’ai l’air de dormir POURQUOI tu me demandes ça ? C’est si dur que ça de voir que je dors sur place et que je voudrai juste rentrer chez moi ? ».
-Ouais d’accord, pas de problème…
-Super ! Encore merci ! Allez, à demain !
Et il repars, me plantant là avec tas de feuilles destiné à une fille à qui je parle jamais et une adresse pour justement lui amener tout ça, alors que j’aimerai juste qu’on me laisse tranquille et, plus dans le cas présent, qu’on me laisse dormir. J’ai beau me demander pourquoi et comment j’ai bien pu accepter, je ne trouve pas de raison satisfaisante. Bon sang, et si je ne veux pas passer pour un lâcheur, je vais être obligé de le faire. J’aurai presque envie de me pendre.
Dans le bus, j’essaye de retrouver ce que je sais de cette fille. Autant dire presque rien. C’est vrai que je ne m’intéresse pas vraiment à ceux qui m’entourent, ils n’en valent pas la peine. C’est à peine si je vois son visage. Ah si, c’était la fille qui pleurait hier à la soirée. Enfin, en fin de soirée. Je crois. Je descends à l’arrêt le plus proche de chez elle, en relisant la note que le délégué m’avait remis. D’après le mot elle vivait seule en appartement, comme moi. Coup de chance, c’est ouvert. J’entre et grimpe les escaliers, avant d’arriver devant sa porte. Je frappe à la porte. Une fois. Deux fois. Trois fois. Aucune réponse. Je m’apprête à abandonner quand dans le doute, je tourne la poignée. Et la porte s’ouvre.
Mû par une curiosité que je ne me connaissais pas, je pénètre chez elle. J’appelle, à tout hasard. Pas de réponse. Pas de bruit. Je passe devant sa salle de bain avant d’entrer dans ce qui semble être à la fois son salon et sa chambre.
C’est en tout cas décoré avec un certain goût, je dois dire. Des posters d’artistes plutôt sympathiques, des couleurs qui vont bien ensemble, c’est propre c’est net. Avec un tabouret posé en plein milieu de la pièce. Et une corde accrochée au plafond.
Je secoue la tête : quoi ??? J’ai beau me pincer, je ne rêve pas. Il y a bien une corde formant un nœud coulant accrochée au plafond, avec un tabouret juste en dessus. Soit une macabre mise en scène, soit la fille qui habite là a des velléités de suicide.
Un bruit résonne derrière moi. Je me retourne pour voir ladite propriétaire qui vient d’entrer. Elle a d’énormes cernes sous les yeux, et encore son maquillage d’hier, qui a coulé sous ses larmes. Elle a l’air d’avoir passé sa nuit à pleurer. Et elle affiche un air hagard en me voyant, comme si elle ne savait pas plus ce qu’elle faisait là que ce que je faisais là. Je tente une approche polie :
-Heu… Salut ?
-Qu’est-ce que… Qu’est-ce que tu fais chez moi ?
-C’est euh… C’est le délégué qui m’a envoyé pour te filer les cours, parce que je n’habite pas loin il s’est dit que je pourrai… Enfin voilà quoi.
Un silence tendu s’installe entre nous. Je ne me suis encore jamais retrouvé dans une situation aussi embarrassante. Je veux dire, mince, j’avais été envoyé simplement pour remettre ses cours à cette fille que je connais juste de vue, et voilà qu’elle me trouve chez elle en même temps que je la trouve avec une corde prête pour un probable suicide. Et maintenant le lourd silence dans l’air achève cette sensation de malaise. Je ne sais pas quoi dire, pas quoi faire. Et on dirait qu’il en est de même pour elle.
-Ah la la… Vous les jeunes êtes vraiment décevant…
Je me retourne pour voir derrière moi un homme assis tranquillement sur le tabouret au-dessus duquel trône la fameuse corde. Je dois fatiguer, je suis sûr qu’il n’y avait personne dans cette pièce quand je suis entré. Je me pince discrètement. Rien.
-Non mais soyons sérieux cinq minutes voulez-vous ? J’ai beau vous placer dans une situation que vous trouvez forte pénible, mais pas de larmes pas de cris… Ni de joie ni de peur, pas même un geste. Ah bon sang, j’aurai aimé un peu de spectacle avant de devoir me montrer.
Il nous dévisage avec un sourire arrogant, semblant prendre un plaisir fou à contempler notre ébahissement. J’essaye d’articuler deux mots, non, deux pensées, face à l’absurdité de la situation. Mais qui est cet homme ? J’ai beau le regarder, rien ne m’éclaire vraiment sur sa nature ou la raison de sa présence ici. Il est bien habillé, vêtu d’un élégant costume et arborant une coiffure impeccable, un visage agréable et surtout un air si supérieur…
J’essaye de ne pas penser au côté improbable de la situation pour me forcer à ouvrir la bouche :
-Qui êtes-vous ? Comment êtes-vous entré ? Qu’est-ce que vous faîtes ici ?
-Oh, que de basiques et classiques questions. C’est d’un ennui… Je te propose un petit jeu plutôt : sur les trois questions que tu as posé, j’en ne répondrai qu’à une seule, et en échange tu répondras toi-même à une des questions que tu me destinait.
-Mais je… C’est absurde, pourquoi est-ce que je…
-Pardon, j’aurai du mieux m’exprimer : je ne te propose pas je t’impose. Allez. Je veux que les prochains mots qui sortent de ta bouche soient l’une des trois questions que tu as posées.
J’essaye de protester mais… Rien ne sort de ma bouche. Je ne comprends pas. Je veux parler, je connais les mots que je veux prononcer, mais pas moyen de les articuler, aucun son ne sort de ma bouche. Mais qu’est-ce qui se passe ? Et qui est ce type ?
-Qui êtes-vous ?
Je m’étonne. J’ai finis par parler… Pour lui poser une question, comme il l’avait demandé.
-Oh, mais voyons, je suis le Joueur.
Son sourire s’élargit encore à la vue de l’expression incompréhensive que mon visage doit dessiner.
-Et… Qui est le Joueur ?
On dirait que je peux parler à nouveau finalement. Mais par prudence je préfère le laisser mener la conversation. Je n’ai vraiment, mais alors là vraiment pas confiance.
-Ah, qui est le Joueur… Mais en voilà une question plus intéressante ! Nous sommes dans un pays où la religion majeure est le christianisme n’est-ce pas ? Alors imagine, imagine que Dieu n’existe pas, imagine que Satan n’existe pas ! Imagine ! Mais, imagine aussi qu’il y ait bien un être suprême. Omnipotent. Omniscient. Tout puissant. Tout moi quoi. Mais cet être ne serait ni bon ni mauvais ! Ou alors bon et mauvais ! Au choix ! Mais en aucun cas rangé dans des cases aussi futiles que le Bien ou le Mal, ou l’Ordre et le Chaos. Non non non, cet être ne serait absolument pas comme ça ! Tu imagines ? Alors maintenant, poses-toi la question, que ferai un être pareil de son éternité, hein ?
Je suis totalement abasourdi par le discours qu’il me tient. Et étrangement fasciné. J’essaye de réfléchir à sa question. Que ferai un être pareil ? Il semble avide de ma réponse alors je m’efforce de le satisfaire, ne voulant en aucun cas me compromettre avec… Quelqu’un, ou quelque chose comme lui. J’essaye de m’imaginer. Améliorer le monde ? Non il n’est ni bon ni mauvais, a-t-il dit. Donc il n’essaye pas de le détruire non plus. Passer l’éternité à lire ou écrire ? Mais non, quand on est omniscient la lecture est inutile, et quand on est omnipotent on peut écrire n’importe quoi aussi vite que l’on veut. Alors quoi ? Si j’étais omniscient et omnipotent, si je pouvais tout faire, si je savais tout, qu’est-ce qu’il m’arriverait. Et la réponse me vient. Evidente après mûre réflexion. Oui, ça n’a aucun sens, mais la scène que je vis n’en a pas tellement non plus.
-Il s’ennuierait. Donc, il ferait un nouveau monde ?
L’homme, ou le Joueur comme il se nomme, semble ravi de ma réponse.
-Ah ! Pas mal, pas mal du tout. On dirait que je t’ai bien choisi toi. Excellent. Eh bien, ta réponse est intéressante. Très même. Mais pour être précis, pourquoi prendre la peine de créer un nouveau monde ? Le Joueur aimerait bien plus… Jouer ! Jouer avec le monde, avec les circonstances, avec le destin ! Jouer ! S’amuser, se divertir, prendre du plaisir ! Et ce, en cherchant de la nouveauté ! De la surprise ! Du changement ! Vois-tu, quand on lance une pièce, avant de la lancer, même en étant omniscient, on ne peut pas savoir de quel côté elle va tomber. Oh certes, on pourrait le décider, mais ce serait moins drôle. Alors que l’excitation de ne pas savoir, de tester, jusqu’au plaisir de la découverte, quand la pièce tombe ! Voilà ce que le Joueur ferait ! Et quand il aurait fini avec la pièce, il prendrait quelques un des dominos de ce monde, les alignerait dans tous les sens, avant d’en pousser un ! Et de voir le résultat ! Voilà ce que ferait le Joueur ! Mais évidemment, un tel être ne saurait exister…
J’ai la tête qui tourne. Qu’est-ce que ce type me raconte ? Bon, et la fatigue aussi n’aide pas. Il me regarde avec un mélange de mépris et de compassion.
-Oh tu es fatigué ? Pardon, je n’y avais pas pensé. Enfin si bien sûr, mais ça me permet de t’offrir une petite démonstration.
A ces paroles je sens ma fatigue me quitter. Subitement. Je me sens comme si je sortais du lit. Je regarde autour de moi, pour voir que la fille chez qui je suis malencontreusement en train de m’incruster depuis tout à l’heure a disparu.
-Tu te demandes où elle est ? Je l’ai emmené ailleurs, je lui explique la même chose qu’à toi. Enfin, elle est toujours chez elle, mais ailleurs. Vous êtes tous les deux ailleurs que chez elle-même si vous êtes quand même chez elle d’ailleurs. Tu devras voir la tête que tu tires, franchement ! C’est à se tordre de rire !
Et à ses propres mots, hilare, il se tord de rire. Mais littéralement. Son corps semble devenir totalement élastique et effectue plusieurs tours sur lui-même tandis qu’il rit à gorge déployée. Puis, aussi soudainement que son hilarité est survenue, elle lui passe. D’un coup. Puis il se tourne vers moi, il me dit :
-Bon sang qu’est-ce que tu es sérieux ! Pourquoi es-tu si sérieux ? Ah oui, pardon, parce que tu te sens perdu peut-être. Bon, à moi de poser une de tes questions : Qu’est-ce que tu fais ici ?
-Et bien j’étais venu amener ses cours à cette fille…
-Ha ! Hahaha ! Toi, amener ses cours à une personne que tu ne connais pas ? Voyons, toi, une des personnes les plus égoïstes qui soient ? Excellente blague, excellente vraiment !
-Je ne suis pas égoïste !
-Oh, non. A peine. Tu ne penses qu’à toi, le nierais-tu ?
-Je peux penser aux autres aussi.
-Tu crois vraiment ? Alors pourquoi méprises-tu tous ceux qui t’entourent ?
-Les gens que je côtoie ne sont pas intéressants. Ils sont vides, sans histoire. Ce n’est pas vraiment du mépris.
-Ah, parce que tu les connais ?
-Pas vraiment mais…
-Mais quoi ? Dis-moi ? Tu ne sais rien d’eux ! Rien ! Tu n’as jamais cherché à les comprendre ou à les connaître, et tu les dis vides, sans histoire ?
-N’es-tu pas censé être ni bon ni mauvais ? Pourquoi me fais-tu la morale ?
-Mais je ne te fais pas la morale ! Je me fiche éperdument que tu les méprises ou non ! Mais je ris ! Je ris des incohérences que tu dis ! Et c’est tellement plus drôle de te les montrer. Tiens, laisse-moi te parler un peu de tes camarades de classe. As-tu idée des histoires, heureuse ou non, que tous se trimballent. C’est absolument fascinant. Par exemple, une des personne de ta classe vis sous un pont depuis quelque temps. Oui, cette personne est en rupture directe avec sa famille et s’est faîte expulser, et a trop honte de sa situation pour en parler ouvertement. Oh, si tu t’intéressai un peu à elle, avec ton esprit que tu crois si intelligent, tu l’aurai sans doute remarqué, que quelque chose n’allait pas, tu l’aurai questionné, et en la poussant un peu, un tout petit peu, elle se serait confié à toi. Une histoire passionnante non ? Quel dommage que tu aies décrété que non, c’était quelqu’un de vide, sans histoire.
-C’est faux… Il n’y a pas de telles histoires autour de moi…
-Le Joueur ne mens jamais. Cela reviendrai à tricher, à briser les règles, et ça ne serait plus amusant. Je dis la vérité. Tiens, une autre histoire, croustillante celle-là : savais-tu que le condisciple que tu rencontres tous les jours dans le tramway avant d’aller sur ton lieu d’étude est amoureux de sa cousine ? Un amour sincère, beau, et que pour une fois je n’ai pas inspiré en plus. Mais à cause des tabous de la société il se dégoûte et se renferme sur lui-même. Il suffirait que quelqu’un lui tende la main…
-Pourquoi vous me raconter tout ça ?
-Mais pour que tu comprennes pourquoi je t’ai choisi. Pourquoi je vous ai choisi, tous les deux. Un être aussi égoïste que toi aurait trouvé une excuse pour ne pas avoir à faire cette corvée, j’ai juste donné un coup de pouce à ta volonté. Quelles étaient les chances que tu n’aies pas à sonner à l’entrée, que la porte soit ouverte sans que la propriétaire ne soit là avant que, comme par hasard, elle n’entre pour te trouver chez elle, avec la corde qu’elle avait préparée (sans mon aide pour le coup) sous tes yeux ébahis ? J’ai favorisé la rencontre de deux personnes semblables en âge, proche géographiquement, et tellement égoïstes…
-Je ne suis pas égoïste ! Même si je m’étais intéressé à ces personnes, qu’est-ce que ça aurai changé ? Rien ! La vie est solitaire, c’est tout ! On naît seul, on vit seul, on meurt seul ! C’est ça la vie !
-Ah, très cher, si ça ne perturbait pas notre hilarante discussion tu n’as pas idée à quel point je serai en train de rire de toi. Tu as quoi, à peine dix-huit ans ? Tu n’es presque jamais sorti de ta ville, encore moins de ton pays, et tu dis savoir ce qu’est la vie ? Mais c’est juste à hurler de rire, tu ne trouves pas ?
-Non ! Ce n’est absolument pas drôle ! Rien n’est vraiment drôle, ni même vraiment plaisant dans ce monde !
-Et voilà en quoi je dis que tu es égoïste ! Et égocentrique d’ailleurs. Tu ne penses qu’à toi et tu veux tout pour toi, même le savoir. Tu crois tout savoir, tu as décidé de ce qu’étaient le bonheur, la vie, les autres, alors que tu ne sais rien du monde ! Tu es encore tout jeune, même si je me plaçais avec des critères humains, tu n’as jamais bougé, exploré, cherché, tu ne connais quasiment rien des grands sentiments de la vie, et tu parles comme si tu savais tout, considérant que toi seul est intéressant, te masquant ton égocentrisme et ton égoïsme derrière ce que tu penses être cynisme et réalisme. Et ça, tu vois, ça c’est drôle ! C’est pour ça que je t’ai choisi : tu es drôle ! Tu es hilarant !
Je ne sais pas quoi répondre. Je me sens… assommé. Vidé mentalement. Et ce malgré l’énergie qu’il m’a donné, ou en tout cas malgré ce qu’il m’a fait, je ne suis pas sûr de bien saisir la situation. J’articule faiblement :
-Pourquoi vous me dîtes tout ça ?
-Ah ! Mais pour mon jeu !
-Quel jeu ?
-Je suis le Joueur ! Je tire mon plaisir à jouer du monde ! Et aujourd’hui, tu as l’insigne honneur d’avoir été jugé assez intéressant pour que je te fasse jouer. Ou alors tu as eu la malchance que je te repère. Au choix. Vois-tu, cette charmante demoiselle avec qui je suis également en train de discuter (ne me regarde pas comme ça, l’ubiquité est quelque chose de bien plus facile à gérer que ça en a l’air) est également une égoïste monumentale. Pas dans le même genre que toi, oh non, elle est très différente. En fait, elle a vécu une histoire d’amour. Assez fade je trouve, mais passons. Mais elle s’est faite « larguer », comme vous dîtes de nos jours. Et il se trouve que madame, pardon, mademoiselle, a décidé que sa peine suffisait à rendre triste tous les gens qui l’apprécient ! Non, mieux, qu’elle pouvait même s’ôter la vie, tant elle ne supporte pas de se faire rejeter. Oui, soyons lucide, la douleur n’est pas tant la perte de l’être aimé ici, mais plutôt la douleur de se faire rejeter. C’est très drôle. Comment imaginer un tel niveau d’égoïsme ? Je veux dire : elle ne connaît rien du monde ni de la vie mais estime en savoir assez pour que sa douleur soit insurmontable, pour que rien ne puisse guérir son cœur, et ainsi de suite. Peux-tu imaginer un tel état d’esprit ? Ah, mais oui, bien sûr que tu peux l’imaginer, tu peux même le pratiquer !
-Bon, d’accord, j’ai compris, arrêtez avec ça. Mais il consiste en quoi votre jeu ?
-A lire.
-Quoi ?
Sous mes yeux ébahis, la pièce se transforme en un vaste lieu de travail, tranquille, avec un confortable canapé, un bureau, une lampe qui éclaire parfaitement et, trônant sur un présentoir au milieu de la pièce, un énorme ouvrage.
-Ceci est l’histoire de ta partenaire d’égoïsme. Le livre de sa vie. Tout ce qu’il lui est arrivé. Cette pièce est hors du temps et l’espace. Ton corps n’éprouvera aucun besoin naturel ici. Tu as tout le temps que tu veux pour lire sa vie. Et la réécrire.
-Quoi ?
-Tu m’as bien compris, arrête avec ces « quoi ? », c’est horripilant. Le Joueur peut modifier l’histoire s’il le désire. Tu veux un exemple ? Donne-moi ton nom.
J’aimerai lui répondre. Sincèrement. Mais je n’ai jamais eu de nom de ma vie. Ce constat frappant arrête instantanément la réponse que je voulais lui fournir.
-Attends. Et maintenant ?
-Tristan.
C’était incroyable. A chaque fois qu’il reposait la question je me fustigeais intérieurement. Je connaissais ma vie tout de même, on m’avait toujours appelé Charles-Apollinaire Constantin. De… Quoi ?
-Et là ?
-C’est bon, j’ai compris ! Mais pourquoi devrai-je changer la vie de cette fille ?
-Je ne t’en donne pas le devoir. Je t’en donne la possibilité. C’est très différent. En temps normal, si je t’avais donné cette option, tu n’en aurai rien fait. Mais en connaissant intégralement la vie d’une personne et après que je t’ai mis face à tes défauts ou qualités, c’est selon, que tu te cachais, que vas-tu faire ? Quel sera ton choix ? Et mieux, quel sera ton choix sachant que l’illustre inconnue (enfin, jusqu’à ce que tu lises sa vie) est exactement dans la même situation avec ta propre vie ?
-Elle a un livre de ma vie ?
-Passionnant n’est-ce pas ? Alors, qu’est-ce que tu vas faire ? Vas-tu la tuer à sa naissance ? Vas-tu résoudre ses problèmes de cœur ? Lui donneras-tu un cancer en sachant qu’elle pourrait te redonner goût à la vie subitement ? Ou lui offriras-tu joie et bonheur en sachant qu’elle peut faire de toi un mort-né ? Ce que vous allez faire, voilà qui est excitant ! Voilà mon jeu ! Tu as l’éternité pour y jouer, le temps n’a pas d’importance ici, et quand tu auras fini, appelle-moi, et nous pourrons assister ensemble à la conclusion de notre magnifique jeu.
-Mais tu es omniscient, non ?
-Le Joueur est omniscient, mais il est aussi omnipotent ! Il est tout à fait possible d’occulter un peu son savoir pour ne pas se révéler à l’avance les résultats du jeu, ce serait de la triche. Le jeu perdrait sa saveur. Une autre triche, que toi tu pourrai faire, serai de rédiger des choses impossibles, contraires aux lois naturelles établies. Tu devras jouer selon les règles qui ont été établies, les règles de ton univers. Pas de triche ! La triche détruit toutes les saveurs. Mais l’ignorance, imaginer jusqu’à la révélation, voilà qui est plaisant, voilà qui me motive ! A tout à l’heure dans une éternité !
Brutale disparition du Joueur sous mes yeux. Je suis seul.
J’ai une forte envie de l’appeler. Tout de suite. Je n’aurai pas touché à son bouquin, et il rira moins. Tout sera terminé, directement. Cette histoire de fou finira simplement, efficacement. Plus d’ennui. Plus à m’intéresser aux autres.
Mais ce livre… Inexorablement et indubitablement ce livre m’attire. Je songe un instant aux pouvoirs du Joueur, puis je me rends compte que ce n’est pas ça. La vie d’une personne, toute entière, accessible. A portée. Et modifiable. Je peux entièrement réécrire la vie d’une autre personne. Le contrôle absolu. Le pouvoir. C’est une nouvelle soif que je ressens. Un mélange subtil de curiosité et d’avidité. L’envie de savoir et l’envie de pouvoir à la fois. Je suis face au fruit défendu et je n’ai qu’à tendre la main pour m’en saisir.
Mais que pourrai-je lui faire ? Du bien ou du mal ? Je ne suis ni particulièrement cruel ni spécialement altruiste. Je me réécrirai une belle histoire, mais que réécrire à quelqu’un dont j’ignore tout ? Sans compter qu’elle possède le même pouvoir sur moi… Il serait inique de la faire souffrir si elle me souhaite du bonheur, mais ne serait-ce pas le comble de la stupidité que de guérir celle qui pourrait être mon bourreau ?
Et quand bien même je saurai que faire, comment le ferai-je ? Je veux dire, si je veux son bonheur, que vais-je lui donner ? Amour ? Argent ? Talent ? La rendre célèbre, la rendre belle, la rendre aimée, la rendre sage ? Quel moyen employé ? Et dans le cas inverse, pour son plus grand malheur, que pourrai-je lui causer ? La tuer à sa naissance ? La faire souffrir toute sa vie ?
Je tourne en rond dans cette pièce parfaite où je pourrai, aux dires du Joueur, tourner ainsi des siècles durant sans ressentir aucun besoin naturel. Je réfléchis à l’impact des paroles du Joueur. Qu’aurai-je fait sans qu’il ne me dise ce qu’il m’a dit ? La réponse est évidente : rien. Alors pourquoi a-t-il dit tout cela ? Je me fige, comprenant enfin : je ne sais plus ce que je veux, et c’est exactement ce que lui désire. Il veut me voir indécis, pour que mon choix le surprenne. Dans ce cas, je vais lui en donner, de la surprise.
Souriant, je pars m’asseoir dans le canapé, et commence la lecture du livre d’une vie…
* * *
-Bienvenue, madame et monsieur ! Oui, vous me pardonnerez le non-usage du pluriel dans cette formule, mais puisque que nous n’avons qu’un homme et une femme ici, et vous êtes en présence d’un bien singulier personnage, vous comprendrez cette version. Nous voici donc réunis en ce jour pour célébrer la conclusion d’un jeu entre deux personnes aussi égocentriques qu’égoïstes, à qui j’ai donné tout pouvoir l’un sur l’autre ! N’est-ce pas magnifique ?
Le Joueur, m’ayant ramené lorsque je l’ai appelé comme promis, se lance à présent dans un discours, en la présence de ma partenaire d’égoïsme et bien entendu de la mienne. Il semblerait que l’approche du dénouement l’excite ou l’amuse au plus haut point. J’ai, étrangement, du mal à qualifier les sentiments d’une entité proche du divin qui s’amuse de moi. Je me décide donc à l’interrompre dans son délire :
-Peux-tu vraiment parler de jeu ? Il n’y a ni amusement pour les joueurs, ni gagnant ni perdant. On ne peut pas vraiment appeler ça un jeu.
-Mais si ! Je m’amuse moi ! Et vous, vous pouvez être gagnants ou perdants, selon ce que vous avez choisi… Ou plutôt selon ce que l’autre a choisi pour vous ! Et c’est l’heure pour vous de le découvrir à quoi l’autre a condamné votre vie passée. Voyons voir… Les dames d’abord !
Sous mes yeux ébahis, le grand livre de ma vie apparais dans les mains du Joueur, tandis que ma… Rivale ? Partenaire ? Je ne sais pas comment la nommer, ma compagne de route, de ce voyage fou, s’efforce de fuir mon regard. Bon sang, qu’a-t-elle écrit ?
-Oh, vous avez honte de ce que vous avez fait l’un ou l’autre ? Mais dans ce cas, expliquez-le ! Lance-toi raconte-nous pourquoi tu as écrit… Une telle chose !
-Comment dire… J’ai lu toute ta vie. Intégralement. Et une chose m’a interpellé…
Sa voix se faisait hésitante. C’était la deuxième fois que j’entendais la voix de cette fille que désormais je connaissais par cœur. Etrange sentiment.
-Tu n’as jamais connu l’Amour. Enfin, pas vraiment. Tu t’es posé pas mal de question dessus et… Tu n’as trouvé aucune réponse. Tu n’as rien trouvé que tu aimais vraiment, même si tu n’as jamais vraiment cherché. Donc… J’ai choisi de changer ça, parce que c’est ce qui m’a fait le plus de mal et le plus de bien à la fois.
-Et je vous interromps tout de suite, car c’est au Joueur d’annoncer la réécriture ! Et qu’est-ce qui a été modifié… Ah, voilà : « si il veut, et uniquement si il veut, le jour où il m’a rencontré, il tombera amoureux de moi, d’un amour fort et sincère, et cet amour lui sera rendu ». Et c’est la seule chose qui fut modifié !
Je n’en reviens pas. Elle n’avait presque pas touché au livre… Et me laissait le choix ? Mais le Joueur interrompt mes pensées, me pointant du doigt :
-A toi de jouer ! Un discours !
-Bien. Je te connais désormais. Entièrement. Et tu as voulu mourir par amour. Pas réellement de tristesse, mais plutôt parce que tu ne supportais pas d’être rejetée. Et pour moi, parce que tu ne sais rien de la vie. Ni du monde. Ni des gens. Un peu comme moi, selon le Joueur. Et pour vérifier ça, j’ai décidé de te permettre de comprendre un peu tout ça, et j’ai fait en sorte d’en profiter.
-Et c’est à moi d’intervenir ! Le Joueur se doit de présenter le résultat ! Voyons comment ta vie a été modifiée ma chère… Oh mais elle a été bouleversée ! Tu as voyagé dis-moi ? Tu es désormais allé partout dans le monde ! En Australie, au Brésil, au Japon, en Chine, en Allemagne, au Italie, en Espagne, au Canda… Et tu as pu rencontrer des personnalités, des hommes et des femmes en tous genre, de tous niveaux mais qui te marqueront. Tu as visité tant de pays et vu tellement de gens que désormais tu possèdes une incroyable culture et vision du monde… Et chaque fois tu racontes tout en détail à ce qui est devenu ton meilleur ami dans cette histoire, l’auteur de la réécriture de ta vie, ici présent ! Et en plus, tu vas faire tous tes voyages… Devine avec qui ? Mais avec l’être que tu aimeras le plus dans ta vie !
Il ferma le livre, avant de reprendre, euphorique :
-C’est splendide ! Magnifique ! Vous avez tous les deux fait un mélange d’égoïsme et de générosité proprement merveilleux ! La fille en manque d’amour qui réclame égoïstement l’amour d’un homme, mais, dans un élan de générosité, lui laisse le choix ! Et le garçon, offrant généreusement à la fille de vivre des expériences, de connaître le monde, la vie, mais en réclamant égoïstement qu’elle lui transmette ce savoir ! C’est juste mirifique ! Vous avez tous les deux réclamez quelque chose d’égoïste, mais y mettant assez de générosité pour que vos histoires soient profitables l’une à l’autre ! Vous avez offert l’amour et la connaissance mais vous l’avez également réclamé l’un à l’autre ! Alors, c’est maintenant que le vrai choix se présente !
Il se tourne vers moi, souriant de toutes ses dents, tandis que mon cœur bat à tout rompre.
-Tu peux accepter la proposition qui t’es offerte. Tu deviendras l’être qu’elle aimera le plus dans sa vie, et tu feras ces voyages avec elles. Ou alors tu les aura faits, ça dépend du point de vue. Et en échange, tu l’aimeras. Ce sera elle, la fille de ta vie. Oh, je ne dis pas que votre amour sera facile, mais il durera jusqu’au bout, ni que vos voyages seront tous plaisants, mais tous enrichissant. Mais pour cela, tu renonces à choisir toi-même la fille de ta vie et à connaître le monde seul, à ta manière. Acceptes-tu de renoncer à ton libre-arbitre et ta vision du monde dont tu es si fier pour avoir enfin ce plaisir que tu cherchais ?
Je réfléchis. Une éternité. Quelque secondes. Trop longtemps. Pas assez. Je l’ignore. Je me sens un peu fou. Un peu génial. Le vertige du pouvoir. Je peux choisir. Je peux décider. Mon choix est arrêté, je vais prendre ma vie en main.
-J’accepte.